Je est un autre
Pour vous citer Rimbaud :
Il me semble étranger
Il me parle en argot !
Alors que moi, voyez
Je critique l’accent
Horrible des banlieues
Et j’ai dit Ils Sont Autres
Ne parlent pas Français
Pas le Français exquis
De la rue où j’habite
Tout près de Saint Germain
Où est le vrai Paris
Et donc la vraie France
Je parle avec la rance
Angoisse d’être né, pour un peu
Loin de l’Ile de France !
Cela donne à ma voix
-Cette angoisse j’ose dire-
Comme une égratignure
Qui la rend éraillée :
Des accents de vieille fille
Que d’aucuns remarquèrent
Disons comme un défaut
Alors que tous égaux
Nous devrions nous entendre
Car je disais Rimbaud
Comme moi est un autre
Je parle en philosophe
Qui passe à la télé
Soyons donc gentils
Une voix de vieille fille
N’est pas à critiquer
Et chacun est un autre
Non seulement pour les autres
Comme dit le poète
Auquel je rends hommage
Disons nolens volens
Et en clair malgré moi !
Voilà messieurs
L’esprit de tolérance
Survit à Saint Germain
Car si je est un autre
Un autre est moi-même
Et ce n’est pas la peine
De compliquer les choses
J’aime la profondeur
Atteinte par Rimbaud
Qui était de Charleville
Mais qui vécu à Paris !
Et à dire la vérité
L’accent de nos banlieues
Où il y a tant d’étrangers
Bien souvent m’interpelle
Et me rappelle un Autre…
Il me nargue au miroir
De la salle de bains
Et me raille et grimace
Comme ferait une vieille fille
Alors que moi, voyez
Je suis en fait cet Autre
De ce Moi qui vous parle
Sans savoir qui Je suis !